​ Tours, Saint-Martin ​- ​Inscription funéraire pour Sidrac  ​  ​


Tours, Saint-Martin ​- ​Inscription funéraire pour Sidrac

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. Hors-série I, nº12 ​  ​


Description générale

Inscription funéraire à caractère tumulaire. 
Dalle funéraire. ​ Pierre, calcaire.  Collection du Musée des Beaux Arts, n° inv. 2004.1.2. Classée monuments historiques au titre des Antiquités et Objets d’art le 24/07/1963 (n° PM 370000763). En 2002, l’inscription était conservée dans les collections de l’ex-Musée martinien, situé dans la chapelle Saint-Grégoire, annexe de la crypte située sous la basilique moderne de Saint-Martin. Elle fut découverte par Mgr C. Chevalier « dans le radier de la chapelle Saint-Brice ». Les lettres, incrustées de plomb, ont été gravées dans du calcaire blanc. Il ne reste de l’épitaphe que la partie située initialement en haut à gauche ; le fragment conservé mesure 45 cm de haut et 35 de large pour 15 cm d’épaisseur. Il faut imaginer au moins une ligne de texte de plus vers le bas (quelques restes sont visibles, quoiqu’informes), ce qui nous amène à une cinquantaine de centimètres de haut. Les dimensions du bloc conservé ainsi que l’apparence générale et la technique de réalisation de l’inscription rappellent celle d’Adalberga ou celle, fragmentaire, du diacre anonyme, ce qui permet d’évaluer la partie disparue à plus des deux tiers, voire des trois quarts de l’inscription d’origine.
Datation : IXe siècle, 1re moitié [datation paléographique].

Bibliographie

Texte d’après l’original (vérifié en 2015).
Chevalier, « Les fouilles de Saint-Martin », 1888, p. 97-98 ; Vieillard-Troiekouroff, « Les sculptures et objets préromans », 1962, p. 113-114 [texte], fig. 35 [photo] ; Treffort, Mémoires carolingiennes, 2007, p. 133 [texte partiel] ; CIFM, 25, 2014, n°117, p. 135-136 [notice abrégée].

Description paléographique

Les lettres mesurent 6 cm de hauteur. L’écriture est très régulière et semble avoir été réglée, même si l’on ne voit plus aucun trait de préparation. Les mots ne sont pas séparés et le fragment conservé ne garde pas trace d’une quelconque ponctuation. On n’observe ni abréviation, ni procédé de condensation des lettres dont le module est ample. Il s’agit exclusivement de capitales romaines, très régulières. L’inscription commence par une croix.





Édition imitative


1 ​✝SVB ​HA[--- ​
2 ​ ​TELLVRE ​[---
3 ​SIDRAC ​[---
4 ​ ​EGREGII ​[---
5 ​ ​NOBILIS ​[---
6 ​---

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2 ​ ​TELLVRE ​[---
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6 ​---

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2 ​ ​TELLVRE ​[---
3 ​SIDRAC ​[---
4 ​ ​EGREGII ​[---
5 ​ ​NOBILIS ​[---
6 ​---

Légende

Violet : caractères allographes.



1 ​✝SVB ​HA[--- ​
2 ​ ​TELLVRE ​[---
3 ​SIDRAC ​[---
4 ​ ​EGREGII ​[---
5 ​ ​NOBILIS ​[---
6 ​---

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



1 ​✝SVB ​HA[--- ​
2 ​ ​TELLVRE ​[---
3 ​SIDRAC ​[---
4 ​ ​EGREGII ​[---
5 ​ ​NOBILIS ​[---
6 ​---

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



1 ​✝SVBHA[---
2 ​TELLVRE[---
3 ​SIDRAC[---
4 ​EGREGII[---
5 ​NOBILIS[---
6 ​---

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

Sub ha[c---] tellure [---] Sidrac [---] egregii [---] nobilis [---].

Traduction

Sous cette…. terre… Sidrac… célèbre… noble…

Commentaire

Le vocabulaire utilisé (tellure, egregii, nobilis…) suggère une réelle recherche littéraire, voire un essai de versification. La formule initiale doit être Sub hac petra tandis que tellure doit entrer dans une formule poétique proche de tituli contemporains, par exemple l’épitaphe d’Hildricus par Micon de Saint Riquier (Conduntur cinere parvi tellure sub ista[1]) ou deux autres inscriptions faisant partie des Carmina Centulensia (Ipsius et corpus recubat tellure sub ista[2], ou Hac tellure sua Milo cum conjuge pausat[3]). On trouve Hic sub tellure dans l’inscription d’Heribertus conservée au Musée Saint-Remi de Reims (inédit, inv. provisoire R19). Pour le reste, egregii qualifie sans doute la fonction du défunt (praesulis egregii par exemple), à moins qu’il ne se rapporte aux mœurs du défunt (moribus egregiis, très fréquente dans la poésie funéraire carolingienne) et nobilis entre vraisemblablement dans une formule du type nobilis in genere sed nobilior meritis… Ces propositions, qui restent nécessairement très impressionnistes, permettent toutefois de reconnaître un texte carolingien recherché sinon original.

La ressemblance formelle et technique avec les épitaphes d’Adalberga et du diacre anonyme mort sous le règne de Louis le Pieux invite à placer cette inscription dans la 1ère moitié du IXe siècle. Un Sidrac est mentionné dans la liste des frères de Saint-Martin de Tours copiée vers 810 dans le liber vitae de l’abbaye de Saint-Gall[4] ; on pourrait avoir affaire au même personnage, sans assurance toutefois. Même si ce nom est relativement rare à l’époque carolingienne[5], d’autres mentions existent, par exemple dans l’obituaire de Saint-Germain-des-Prés, à la date du 3 mars (Sidrach sacerdotis[6]).




[1] MGH, Poet. lat., III, p. 314.
[2] MGH, Poet. lat., III, p. 333.
[3] MGH, Poet. lat., III, p. 344.
[4] Libri confraternitatum Sancti Galli Fabariensis, éd. P. Piper, Berlin, 1884(Monumenta Germaniae Historica), p. 13.
[5] Morlet, Les noms de personne, 1972, t. I, p. 197.
[6] Cf. Obituaire de la province de Sens, t. I (Diocèses de Sens et de Paris), 1re partie, éd. A Molinier, Paris, 1902, p. 257.