​ Angers, ancien évêché (prov. : cathédrale ?) ​- ​Inscription funéraire partielle pour Abra…  ​  ​


Angers, ancien évêché (prov. : cathédrale ?) ​- ​Inscription funéraire partielle pour Abra…

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. Hors-série I, nº20 ​  ​


Description générale

Inscription funéraire à caractère tumulaire et obituaire. 
Dalle funéraire. ​ Pierre, ardoise.  Vraisemblablement découverte près de la cathédrale d’Angers, cette inscription est conservée dans la salle des pas perdus de l’ancien évêché (ex-Musée diocésain), à 3 m. du sol contre le mur. L’inscription est gravée sur un bloc d’ardoise cassé à droite et à gauche ; les bords sont conservés en haut et en bas. La partie restante est relativement bien conservée. Sans ornement, l’inscription devait se développer à l’intérieur d’un cadre composé de deux traits parallèles, encore visibles en haut et en bas. Le fragment présente les dimensions suivantes : H = 51 cm ; l. = 68 cm ; ép. = 7 cm.
Datation : 1ère moitié du IXe siècle [datation paléographique].

Bibliographie

Lecture d’après l’original (vérifié en 2009).
Barbier de Montault, Épigraphie Maine-et-Loire, 18689, p. 17 [texte] ; Treffort, « Un témoin de la vie politique Ato », [texte] ; Treffort, Mémoires carolingiennes, 2007, p. 314 [mention] ; CIFM, 24, 2010, n°74, p. 96 [notice abrégée].

Description paléographique

Le texte est écrit en capitales romaines. Les lettres mesurent environ 4,2 cm. Le champ épigraphique couvre l’ensemble de la dalle conservée. On remarque une double réglure, encore visible sur la surface de la pierre. Interlignes et lignes d’écriture sont parfaitement réguliers. Les mots ne sont absolument pas séparés les uns des autres. Aucune lettre n’est décorée et l’on n’observe aucune ponctuation. Les abréviations sont rares et limitées à la date et au nomen sacrum du Seigneur. Aucun enclavement, entrelacement ou conjonction n’est perceptible sinon un V enclavé dans un C (l. 3), M et P conjoints (l. 3) et un I plus petit à la l. 2. Les tildes abréviatifs sont droits. Sous l’inscription principale, une lettre a été ajoutée : un N (plutôt qu’un Z) ; on ignore si elle faisait partie d’une série ou s’il s’agit d’une lettre isolée.





Édition imitative


1 ​---] ​SSA ​ ​HIC ​ ​IACET ​ABRA[---] ​
2 ​---] ​EVA ​ ​CVIVS ​ ​VITA ​ ​SATIS ​ ​CV[--- ​
3 ​---] ​AM ​ ​PER ​ ​DIVRNVM ​ ​TE ​[---
4 ​---] ​SVPPLEX ​ ​EFFLAGITO ​ ​LE[--- ​
5 ​---]I ​ ​ID̅ ​ ​APRL̅S ​ ​REGNA ​ ​B[--- ​
6 ​---] ​ONIS ​DN̅I ​[---

1 ​---] ​SSA ​ ​HIC ​ ​IACET ​ABRA[---] ​
2 ​---] ​EVA ​ ​CVIVS ​ ​VITA ​ ​SATIS ​ ​CV[--- ​
3 ​---] ​AM ​ ​PER ​ ​DIVRNVM ​ ​TE ​[---
4 ​---] ​SVPPLEX ​ ​EFFLAGITO ​ ​LE[--- ​
5 ​---]I ​ ​ID̅ ​ ​APRL̅S ​ ​REGNA ​ ​B[--- ​
6 ​---] ​ONIS ​DN̅I ​[---

1 ​---] ​SSA ​ ​HIC ​ ​IACET ​ABRA[---] ​
2 ​---] ​EVA ​ ​CVIVS ​ ​VITA ​ ​SATIS ​ ​CV[--- ​
3 ​---] ​AM ​ ​PER ​ ​DIVRNVM ​ ​TE ​[---
4 ​---] ​SVPPLEX ​ ​EFFLAGITO ​ ​LE[--- ​
5 ​---]I ​ ​ID̅ ​ ​APRL̅S ​ ​REGNA ​ ​B[--- ​
6 ​---] ​ONIS ​DN̅I ​[---

Légende

Violet : caractères allographes.



1 ​---] ​SSA ​ ​HIC ​ ​IACET ​ABRA[---] ​
2 ​---] ​EVA ​ ​CVIVS ​ ​VITA ​ ​SATIS ​ ​CV[--- ​
3 ​---] ​AM ​ ​PER ​ ​DIVRNVM ​ ​TE ​[---
4 ​---] ​SVPPLEX ​ ​EFFLAGITO ​ ​LE[--- ​
5 ​---]I ​ ​ID̅ ​ ​APRL̅S ​ ​REGNA ​ ​B[--- ​
6 ​---] ​ONIS ​DN̅I ​[---

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



1 ​---] ​SSA ​ ​HIC ​ ​IACET ​ABRA[---] ​
2 ​---] ​EVA ​ ​CVIVS ​ ​VITA ​ ​SATIS ​ ​CV[--- ​
3 ​---] ​AM ​ ​PER ​ ​DIVRNVM ​ ​TE ​[---
4 ​---] ​SVPPLEX ​ ​EFFLAGITO ​ ​LE[--- ​
5 ​---]I ​ ​ID̅ ​ ​APRL̅S ​ ​REGNA ​ ​B[--- ​
6 ​---] ​ONIS ​DN̅I ​[---

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



1 ​---]SSAHICIACETABRA[---]
2 ​---]EVACVIVSVITASATISCV[---
3 ​---]AMPERDIVRNVMTE[---
4 ​---]SVPPLEXEFFLAGITOLE[---
5 ​---]IID̅APRL̅SREGNAB[---
6 ​---]ONISDN̅I[---

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

[--- ​fo]ssa hic jacet Abra [--- ]eva cujus vita satis cu [--- ]am per diurnum te [---] supplex efflagito le[ctor---] I id(us) apr(i)l(i)s regna b [--- incarnati]onis D(omi)ni [---].

Traduction

… ici gît Abra… dont la vie [fut] assez… pendant le jour… je [te] demande en suppliant, lecteur… des ides d’avril… les royaumes… de l’Incarnation du Seigneur…

Commentaire

Malgré le caractère fragmentaire de l’inscription, celle-ci apparaît dans une forme latine tout à fait digne de la réforme carolingienne. Le formulaire dénote une recherche littéraire certaine, peut-être versifié à l’origine. On peut remarquer le terme supplex, présent également sur l’inscription d’Ingelsen[1], et l’appel au lecteur, extrêmement fréquent à Angers. La séquence cujus vita satis rappelle les formules que l’on trouve sur l’épitaphe de l’abbé anonyme de Ligugé (cui fuit alma fides vita beata satis), de la fin du VIIIe ou du début du IXe siècle[2], ou sur celle de Giswahlus à Château-Gontier (cujus fides vera et vita fuit beata)[3].

X. Barbier de Montault datait cette inscription du XIe siècle, date qui ne semble pas pouvoir être retenue à cause de l’absence totale d’onciale, pourtant courante à cette époque en particulier dans les tituli des manuscrits émanant du scriptorium d’Angers[4]. En fait, l’usage exclusif de la capitale romaine sans aucune onciale et la rareté des conjonctions de lettres invitent à placer cette inscription à l’époque carolingienne. La grande régularité des lettres et la remarquable exécution de l’ensemble suggère le IXe siècle, peut-être la première moitié, sans certitude toutefois concernant cette dernière précision.

Le caractère fragmentaire de l’inscription interdit de développer des interprétations historiques trop poussées. Le nom du défunt, qui commence par Abra… a toutes chances d’être Abraham, même si M.-Th. Morlet répertorie également Abrada et Abranus[5]. Les documents angevins carolingiens ne permettent pas une identification plus poussée. Selon X. Barbier de Montault, cette inscription proviendrait de la cathédrale ; si tel était le cas, il s’agirait de la plus ancienne attestation d’une inhumation intra muros à Angers.




[1] CIFM, HSI, n°46.
[2] Treffort, « La dalle funéraire », 2007, p. 265-276.
[3] Voir Favreau, Épigraphie médiévale, 1997, n°23, p. 97, fig. 18.
[4] Voir Vezin, Les "scriptoria" d'Angers au XIe siècle , Paris, 1974, p. 167-170 et pl. 11, 32-33.
[5] Morlet, Les noms de personne, 1972, t. I, p. 13.