​ Angers, ancienne église Saint-Pierre ​- ​Inscription funéraire pour Dominicus  ​  ​


Angers, ancienne église Saint-Pierre ​- ​Inscription funéraire pour Dominicus

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. Hors-série I, nº45 ​  ​


Description générale

Inscription funéraire à caractère tumulaire. 
Dalle funéraire. ​ Pierre, ardoise.  Inscription perdue. Au moment de sa découverte place du Ralliement, sur l’emplacement de l’ancienne église Saint-Pierre, en janvier 1868, elle avait été déposée au Musée Toussaint par les soins de L. de Farcy qui l’avait fait placer « à droite en entrant sur un tombeau en ciment ». Les multiples déménagements de la collection lapidaire et la fragilité de la pierre (déjà signalée au XIXe siècle) sont vraisemblablement responsables de sa disparition. D’après les notes de L. de Farcy et V. Godard-Faultrier, il s’agissait d’une dalle d’ardoise, brisée à l’extrémité gauche. Elle semble avoir été décorée d’un chevron sur le côté. On ignore les dimensions de la dalle. Au moment de la découverte : inscription partielle ; état de conservation : moyen.
Datation : fin IXe ou début du Xe siècle [datation paléographique à partir du dessin de Godard-Faultrier]

Bibliographie

Texte établi à partir du dessin de V. Godard-Faultrier.
Angers, AD 49, Arch. Godard-Faultrier (« Études sur quelques pierres ») [texte, dessin, étude] ; Godard-Faultrier, Étude sur quelques pierres, 1869, n°4, p. 13 [texte] ; Soland, « Tablettes contemporaines », 1868, p. 281 [|mention] ; Treffort, Mémoires carolingiennes, 2007, ill. 81 [dessin], p. 317 [mention, bibliographie].

Description paléographique

La description paléographique est limitée par le caractère schématique des relevés de V. Godard-Faultrier, mais peut être complétée par ses observations. Les lignes ont dû être préparées grâce à une réglure, car le texte paraît très régulier. La majorité des lettres sont des capitales romaines, mais tous les C sont carrés, et l’on remarque une onciale (petit E dans le C, ligne 2) et une minuscule (le Q, ligne 1 et ligne 4). Les mots n’étaient vraisemblablement pas séparés et il ne semble n’y avoir aucun signe de ponctuation. On remarque quelques enclavements (E dans C à la ligne 2) et conjonctions (N et E, également à la ligne 2) qui restent rares. Seules deux abréviations ont été utilisées, pour Christum (l. 3) et Dominum (l. 4), nomina sacra par excellence. L’abréviation de Dominum par les trois lettres DVM est surprenante ; toutefois, la lettre conservée en accompagnement du dessin, signée de L. de Farcy insiste sur le fait que « les inscriptions sont déjà bien usées, surtout au milieu ». La lettre dessinée comme un V était vraisemblablement un N, comme le restitue d’ailleurs V. Godard-Faultrier lui-même dans sa publication[1]. L’usage d’un tilde à renflement médian, pratique peu attestée dans l’épigraphie avant le XIe siècle, pourrait quant à lui être corroboré par un autre exemplaire, malheureusement perdu lui aussi, mais dont l’estampage est conservé[2] et qui semble contemporain.





Édition imitative


1 ​---] ​C ​LAPIDE ​REQVIESCIT ​CORPVS ​[---
2 ​ ​---]SI ​ ​NOMINE ​DOMINICVS ​ ​SACERDOS ​ ​QVI ​ ​OBIIT ​[---]
3 ​O ​LECTORES ​SVPLEX ​XPM ​DEPOSCE ​BE[---] ​
4 ​VT ​DET ​ILLI ​DNM ​REQVIAM ​[3]SEMPI
5 ​---]AM ​

1 ​---] ​ ​LAPIDE ​REqVIESIT ​ORPVS ​[---
2 ​ ​---]SI ​ ​NOMINE ​DOMINIVS ​ ​SARDOS ​ ​QVI ​ ​OBIIT ​[---]
3 ​O ​LETORES ​SVPLEX ​XPM ​DEPOSE ​BE[---] ​
4 ​VT ​DET ​ILLI ​DNM ​REqVIAM ​[3]SEMPI
5 ​---AM ​

1 ​---] ​ ​LAPIDE ​REqVIESIT ​ORPVS ​[---
2 ​ ​---]SI ​ ​NOMINE ​DOMINIVS ​ ​SARDOS ​ ​QVI ​ ​OBIIT ​[---]
3 ​O ​LETORES ​SVPLEX ​XPM ​DEPOSE ​BE[---] ​
4 ​VT ​DET ​ILLI ​DNM ​REqVIAM ​[3]SEMPI
5 ​---]AM ​

Légende

Violet : caractères allographes.



1 ​---] ​ ​LAPIDE ​REqVIESIT ​ORPVS ​[---
2 ​ ​---]SI ​ ​NOMINE ​DOMINIVS ​ ​SARDOS ​ ​QVI ​ ​OBIIT ​[---]
3 ​O ​LETORES ​SVPLEX ​XPM ​DEPOSE ​BE[---] ​
4 ​VT ​DET ​ILLI ​DNM ​REqVIAM ​[3]SEMPI
5 ​---]AM ​

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



1 ​---] ​ ​LAPIDE ​REqVIESIT ​ORPVS ​[---
2 ​ ​---]SI ​ ​NOMINE ​DOMINIVS ​ ​SARDOS ​ ​QVI ​ ​OBIIT ​[---]
3 ​O ​LETORES ​SVPLEX ​XPM ​DEPOSE ​BE[---] ​
4 ​VT ​DET ​ILLI ​DNM ​REqVIAM ​[3]SEMPI
5 ​---]AM ​

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



1 ​---]LAPIDEREqVIESITORPVS[---
2 ​---]SINOMINEDOMINIVSSARDOSQVIOBIIT[---]
3 ​OLETORESSVPLEXXPMDEPOSEBE[---]
4 ​VTDETILLIDNMREqVIAM[3]SEMPI
5 ​---]AM

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

[Sub hoc lapide requiescit corpus [--- religio]si nomine Dominicus sacerdos qui obiit [---]. O lectores suplex Chr(istu)m deposce be[nignum] ut det illi D(omi)n(u)m requiam[3] sempi[tern]am.

Traduction

Sous cette pierre repose le corps d’un [homme] religieux, le prêtre Dominique qui est mort… O lecteur, sois suppliant, invoque le Christ bienveillant, afin que le Seigneur lui donne le repos éternel.

Commentaire

Si la lecture de V. Godard-Faultrier est bonne, on remarque quelques modifications grammaticales ou orthographiques dans le latin : l’absence d’un second P dans supplex, la désinence –am pour requiem (s'il ne s'agit pas d'un problème de copie). Cette inscription malheureusement disparue présente des similitudes de formulaire avec celle d’Ingelsen, en particulier en ce qui concerne l’appel au lecteur et la forme de la prière, empruntée à la liturgie des défunts et que l’on retrouve dans d’autres épitaphes contemporaines[4]. On ignore en revanche ce qui pouvait faire suite à la formule qui obiit, l’espace sur la dalle paraissant en effet insuffisant pour recevoir une datation.

La régularité de l’écriture, l’absence presque totale d’onciales et d’enclavements, malgré la présence déjà de nombreuses lettres carrées, suggèreraient une réalisation de cette pierre à la fin du IXe ou au début du Xe siècle, légèrement postérieure à celle d’Ingelsen, à laquelle elle pourrait être apparentée, les onciales en moins. Aucun document contemporain ne permet d’affiner l’analyse historique. On peut remarquer toutefois que le nom du défunt, Dominicus, est un des rares de la série angevine à être d’origine latine[5] ; dérivé de Dominus, le Seigneur, il s’accorde particulièrement bien avec la fonction sacerdotale du défunt.




[1] Étude sur quelques pierres, n°4, p. 13
[2] Voir dans ce volume l'inscription n° 48.
[3] On peut s'étonner encore du mot requiam, dessiné tel quel sur le relevé de V. Godard-Faultrier, mais faute de pouvoir vérifier la lecture sur l'original ou un quelconque estampage, nous avons préféré ne pas corriger la transcription du premier éditeur.
[4] On verra par exemple le vers 5 de l'épitaphe de Willerus à Trêves : Atque precor, Christum supplex deposce benignum. MGH, Poet. lat., V, n°68, p. 317.
[5] Morlet, Les noms de personne, 1972, t. II, p. 42.