​ Château-Gontier (53), église de Bazouges ​- ​Inscription funéraire pour Giswhalus  ​  ​


Château-Gontier (53), église de Bazouges ​- ​Inscription funéraire pour Giswhalus

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. Hors-série I, nº53 ​  ​


Description générale

Inscription funéraire à caractère tumulaire. 
Dalle funéraire. ​ Pierre, ardoise.  Inscription tracée sur une dalle d’ardoise de grande dimension (176 x 42 cm). Découverte dans le sol de l’église de Bazouges à Château-Gontier lors de travaux, elle est aujourd’hui encastrée dans le mur du bas-côté nord. L’inscription se développe sur 6 lignes, disposées à l’intérieur d’un cadre double fortement incisé dans l’ardoise. La sixième ligne est tracée au-dessous des lignes préparées par les doubles réglures (qui ont facilité dans les 5 premières une disposition soignée) et l’agencement du texte est très perturbé par le manque de place disponible. Inscription complète ; état de conservation : bon.
Datation : 876 [datation interne].

Bibliographie

Texte établi d’après l’original vu en place en 2002.
Paris, Bibl. Institut, Arch. E. Le Blant, ms. 1723 ; « Inscriptions carlovingiennes », p. 8 [dessin] ; Paris, BnF, ms. nouv. acq. lat. 5569 (collection Ramé), liasse 1, VIII, n° 706 [estampage] ; Bauluère, « Inscription Bazouges », 1852-1853, p. 144 [texte] ; Angot, Épigraphie Mayenne, 1907, t. I, p. 68 [dessin] ; Deschamps, Étude sur la paléographie, 1929, fig. 5 [photo] ; Favreau, Épigraphie médiévale, 1997, n°23, p. 97, fig. 18 [dessin] ; Treffort, « Corps individuel », 2004, p. 35 [texte, traduction, photographie] ; Treffort, Mémoires carolingiennes, 2007, p. 201 [dessin], p. 323 [mention et bibliographie exhaustive].

Description paléographique

Écriture exclusivement composée de capitales romaines très régulières et très soignées, de tracé fin et de module variable. Plusieurs C sont carrés. On notera la forme particulière du H avec une barre transversale bombée. La paléographie de la sixième ligne est identique malgré la taille réduite des lettres et l’irrégularité des modules. On remarque plusieurs lettres de petit module inscrites dans la panse des lettres rondes ainsi que plusieurs enclavements et un entrelacement (dans quicumque). Les abréviations sont relativement nombreuses. Elles concernent les nomina sacra, les éléments de datation, mais affectent également des pronoms ou des verbes composés d’une syllabe qu-. La ponctuation par un point médian est irrégulière et ne semble pas respecter la syntaxe. La double ponctuation sépare la mention tumulaire des informations obituaires et clôt le texte. Pas de décor particulier.





Édition imitative


1 ​✝SVB ​HOC ​LAPIDE ​REQVIESCIT ​· ​CORPVS ​· ​VIRI ​RELIGIOSI ​
2 ​BEATE ​· ​MEMORIE ​NOMINE ​· ​GISHV·VALI ​· ​CVIVS ​FIDES ​VERA ​· ​ET ​
3 ​VITA ​FVIT ​BEATA ​⁝ ​HIC ​DECESSIT ​III ​KL ​APRL ​· ​HVC ​QVICV̅Q⁝ ​
4 ​VENIS ​· ​ET ​CERNIS ​· ​DICITO ​· ​Q⁝SO ​· ​CISHV·VALI ​FAMVLI ​REX ​MISE
5 ​RERE ​D̅S ​· ​ANNO ​INCARNACIONIS ​DN̅I ​· ​DCCC· ​LXX· ​VI ​INDICCIONE ​: ​VIIII ​· ​
6 ​REGNANTE ​· ​KAROLO ​· ​IM̅PR ​ANNO ​PRIMO ​: ​

1 ​✝SVB ​HO ​LAPIDE ​REQVIESCIT ​· ​CORPVS ​· ​VIRI ​RELIGIOSI ​
2 ​BEATE ​· ​MEMORIE ​NOMINE ​· ​GISHV·VALI ​· ​CVIVS ​FIDES ​VERA ​· ​ET ​
3 ​VITA ​FVIT ​BEATA ​⁝ ​HIC ​DECESSIT ​III ​KꝈ ​APRꝈ ​· ​HV ​QVICV̅Q⁝ ​
4 ​VENIS ​· ​ET ​CERNIS ​· ​DICITO ​· ​Q⁝SO ​· ​CISHV·VALI ​FAMVLI ​REX ​MISE
5 ​RERE ​D̅S ​· ​ANNO ​INARNACIONIS ​DN̅I ​· ​DCCC· ​LXX· ​VI ​INDICCIONE ​: ​VIIII ​· ​
6 ​REGNANTE ​· ​KAROLO ​· ​IM̅PR ​ANNO ​PRIMO ​: ​

1 ​SVB ​HO ​LAPIDE ​REQVIESCIT ​· ​CORPVS ​· ​VIRI ​RELIGIOSI ​
2 ​BEATE ​· ​MEMORIE ​NOMINE ​· ​GISHV·VALI ​· ​CVIVS ​FIDES ​VERA ​· ​ET ​
3 ​VITA ​FVIT ​BEATA ​⁝ ​HIC ​DECESSIT ​III ​K ​APR ​· ​HV ​QVICV̅Q⁝ ​
4 ​VENIS ​· ​ET ​CERNIS ​· ​DICITO ​· ​Q⁝SO ​· ​CISHV·VALI ​FAMVLI ​REX ​MISE
5 ​RERE ​D̅S ​· ​ANNO ​INARNACIONIS ​DN̅I ​· ​DCCC· ​LXX· ​VI ​INDICCIONE ​: ​VIIII ​· ​
6 ​REGNANTE ​· ​KAROLO ​· ​IM̅PR ​ANNO ​PRIMO ​: ​

Légende

Violet : caractères allographes.



1 ​✝SVB ​HO ​LAPIDE ​REQVIESCIT ​· ​CORPVS ​· ​VIRI ​RELIGIOSI ​
2 ​BEATE ​· ​MEMORIE ​NOMINE ​· ​GISHV·VALI ​· ​CVIVS ​FIDES ​VERA ​· ​ET ​
3 ​VITA ​FVIT ​BEATA ​⁝ ​HIC ​DECESSIT ​III ​KꝈ ​APRꝈ ​· ​HV ​QVICV̅Q ​
4 ​VENIS ​· ​ET ​CERNIS ​· ​DICITO ​· ​QSO ​· ​CISHV·VALI ​FAMVLI ​REX ​MISE
5 ​RERE ​D̅S ​· ​ANNO ​INARNACIONIS ​DN̅I ​· ​DCCC· ​LXX· ​VI ​INDICCIONE ​: ​VIIII ​· ​
6 ​REGNANTE ​· ​KAROLO ​· ​IM̅PR ​ANNO ​PRIMO ​: ​

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



1 ​✝SVB ​HO ​LAPIDE ​REQVIESCIT ​· ​CORPVS ​· ​VIRI ​RELIGIOSI ​
2 ​BEATE ​· ​MEMORIE ​NOMINE ​· ​GISHV·VA LI ​· ​CVIVS ​FIDES ​VERA ​· ​ET ​
3 ​VITA ​FVIT ​BEATA ​⁝ ​HIC ​DECESSIT ​III ​KꝈ ​APRꝈ ​· ​HV ​QVICV̅Q⁝ ​
4 ​VENIS ​· ​ET ​CERNIS ​· ​DICITO ​· ​Q⁝SO ​· ​CISHV·VA LI ​FAMVLI ​REX ​MISE
5 ​RERE ​D̅S ​· ​ANNO ​INARNACIONIS ​DN̅I ​· ​DCCC· ​LXX· ​VI ​INDICCIONE ​: ​VIIII ​· ​
6 ​REGNANTE ​· ​KAROLO ​· ​IM̅PR ​ANNO ​PRIMO ​: ​

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



1 ​✝SVBHOLAPIDEREQVIESCIT· ​CORPVS·VIRIRELIGIOSI
2 ​BEATE·MEMORIENOMINE·GISHV·VALI·CVIVSFIDES ​VERA·ET
3 ​VITAFVITBEATAHICDECESSIT ​III ​KꝈAPRꝈ·HVQVICV̅Q⁝
4 ​VENIS·ETCERNIS·DICITO·Q⁝SO·CISHV·VALIFAMVLIREXMISE
5 ​RERED̅S·ANNOINARNACIONISDN̅I·DCCC·LXX·VIINDICCIONE:VIIII·
6 ​REGNANTE·KAROLO· ​ ​ ​IM̅PRANNOPRIMO:

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

Sub hoc lapide requiescit corpus viri religiosi, beate memorie, nomine Gishwali cujus fides vera et vita fuit beata. Hic decessit III k(a)l(endas) apr(i)l(is). Huc quicu(m)q(ue) venis et cernis, dicito q(uae)so Gishwali famuli rex mise rere D(eu)s. Anno incarnacionis D(omi)ni DCCCLXXVI, indiccione VIIII, regnante Karolo imp(e)r(atore) anno primo.

Traduction

Sous cette pierre repose le corps d’un homme religieux, de bienheureuse mémoire, du nom de Gishwalus, dont la foi fut vraie et la vie sainte. Il est mort le trois des calendes d’avril [30 mars]. Qui que tu sois qui viens ici et regardes, dis, je t’en prie : « O Dieu roi, aie pitié de ton serviteur Gishwalus ». En l’an de l’incarnation du Seigneur 876, en la 9ème indiction, sous le règne de Charles, en sa première année comme empereur.

Commentaire

Même si elle se compose de formules très fréquentes dans l’épigraphie funéraire du haut Moyen Âge, l’épitaphe de Bazouges n’en constitue pas moins un texte original et d’un grand intérêt. Rédigée dans un latin réformé de bonne qualité, elle propose un formulaire très complet : mention tumulaire, éloge du défunt, nom du défunt, mention obituaire, appel au lecteur, vœu pieux, datation précise. Comme dans un grand nombre de textes contemporains, l’inscription a une dimension cumulative, avec une juxtaposition d’expressions funéraires bien construites mais offrant tout de même un texte décousu. Les principales originalités proviennent de variantes dans la mise en place des formules : beate memorie pour bone memorie, hic decessit pour hic obiit, quicumque venis pour quicumque legis.

Outre ses qualités graphiques et littéraires, cette inscription se démarque également de ses contemporaines par le mode de datation qui utilise conjointement l'ère de l'incarnation, le système des indictions et la mention du souverain régnant, pratique plus courante dans la diplomatique que dans l'épigraphie médiévale. On remarquera que le roi mentionné par l'inscription, Charles le Gros, troisième fils de Louis le Germanique (mort le 26 août 876), est déjà considéré comme empereur, avant même son couronnement impérial à Rome le 12 février 881. Le défunt n'est malheureusement pas connu par ailleurs même si son nom, formé à partir de la racine Gis- et vraisemblablement du suffixe -walha[1], rappelle des formes attestées dans la documentation contemporaine.




[1] Morlet, Les noms de personne, t. I, p. 109-110 et 214-215.