​ Melle, église saint-Pierre ​- ​Inscription funéraire pour Leuterius  ​  ​


Melle, église saint-Pierre ​- ​Inscription funéraire pour Leuterius

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. Hors-série I, nº67 ​  ​


Description générale

Inscription funéraire à caractère tumulaire. 
Dalle funéraire. ​ Pierre, calcaire.  L’inscription prend place sur une plate-tombe d’enfant découverte lors des fouilles menées en 1992 près de la porte latérale sud de l’église Saint-Pierre de Melle (sépulture n° 15) ; elle est aujourd'hui exposée à l'intérieur de l'église. Tombe en calcaire local, elle était entièrement gravée lors de sa découverte. Elle est cassée en deux et a perdu son angle supérieur gauche. Dimensions = 89 x 30/43 cm ; épaisseur = 10 cm. Dalle inscrite dans le sens vertical ; le champ épigraphique a été préparé en creux, marge laissée de chaque côté, avec double ressaut, forme une sorte de cadre. On devine encore les traces d'une réglure finement incisée. Inscription partielle ; état de conservation : bon.
Datation : seconde moitié du IXe siècle [datation paléographique].

Bibliographie

Texte établi d’après l’original vu en place en 2009.
Farago-Szekeres, « Les fouilles Saint-Pierre Melle », 1993, p. 436-437 [dessin, texte] ; Vareille, « Les épitaphes médiévales de Melle », 2004, p. 93 [texte, traduction, photo, étude] ; Treffort, Mémoires carolingiennes, 2007, p. 113 [cliché], p. 328 [mention] ; Jarry, Corpus des inscriptions, 2009, p. 114 [texte, traduction] ; Une société de pierre, 2009, p. 34 [texte et cliché].

Description paléographique

Les lettres sont en belles capitales romaines, régulières. Le C de la ligne 1 et le Q sont parfaitement ronds. La barre transversale du H ligne 1 était courbée vers le haut. Deux lettres carrées : le C de requiescit et le G de Gislebrandi. Hauteur moyenne des lettres = 5, 5 cm. Pas de trace de ponctuation, ni d'abréviation.





Édition imitative


1 ​---]RE
2 ​QVIESCIT ​
3 ​LEVTERI
4 ​VS ​GISLE
5 ​BRA[.]D[.] ​
6 ​FILIVS ​O
7 ​[...]T ​XII ​
8 ​---

1 ​---]RE
2 ​QVIESIT ​
3 ​LEVTERI
4 ​VS ​ISLE
5 ​BRA[.]D[.] ​
6 ​FILIVS ​O
7 ​---T ​XII ​
8 ​---

1 ​---]RE
2 ​QVIESIT ​
3 ​LEVTERI
4 ​VS ​ISLE
5 ​BRA[.]D[.] ​
6 ​FILIVS ​O
7 ​[...]T ​XII ​
8 ​---

Légende

Violet : caractères allographes.



1 ​---]RE
2 ​QVIESIT ​
3 ​LEVTERI
4 ​VS ​ISLE
5 ​BRA[.]D[.] ​
6 ​FILIVS ​O
7 ​[...]T ​XII ​
8 ​---

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



1 ​---]RE
2 ​QVIESIT ​
3 ​LEVTERI
4 ​VS ​ISLE
5 ​BRA[.]D[.] ​
6 ​FILIVS ​O
7 ​[...]T ​XII ​
8 ​---

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



1 ​---]RE
2 ​QVIESIT
3 ​LEVTERI
4 ​VSISLE
5 ​BRA[.]D[.]
6 ​FILIVSO
7 ​[...]TXII
8 ​---

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

[ Hic]  requiescit Leuterius Gislebra[n]d[i] filius o[bii]t XII [---].

Traduction

Ici repose Leuterius, fils de Gislebrandus, qui est mort le 12…

Commentaire

Les personnages concernés par ce texte – Leuterius et son père Gislebrandus – sont inconnus dans notre documentation. La présence de cette plate-tombe qui porte les marques de la réforme carolingienne suggère la présence à Melle d’un petit groupe formé à la cour ou du moins dans sa mouvance, peut-être lié à l’activité de l’atelier monétaire. Le nom de Leuterius sous ses formes diverses[1] est très fréquent dans la région[2] comme dans l’ensemble du monde carolingien. Le nom de Gislebrandus, connu pour le IXe siècle[3], est formé à partir de deux racines Gis- et -bradus, eux aussi assez fréquents[4].

La perfection de la réalisation matérielle et l’orthographe laisse supposer que cette épitaphe est postérieure à la réforme carolingienne de l’écriture et doit être placée au IXe siècle, ce que ne contredit pas l’analyse paléographique. L’abondance de belles et amples capitales romaines suggère en effet le IXe siècle, tandis que la présence de deux lettres carrées font penser à la seconde moitié de ce siècle. La forme particulière du H se retrouve à la fin du VIIIe siècle à Angers (dans la dalle d’Autbertus[5]) et à Vertou[6], mais surtout à Château-Gontier, en 876 sur la dalle de Giswahlus[7] qui comporte aussi des C carrés. Le G carré existe dans la seconde moitié du IXe siècle (fragment de l’épitaphe de Boson, mort en 889, à Vienne[8], ou dans l’épitaphe d’Oulricus à Angers en 910[9]). La forme du Q avec la queue partant vers la droite, rappelle celui que l’on voit à Tours sur la dalle d’Adalberga en 830 ou 840[10] et sur celle d’Amelius mort en 874 à Poitiers[11]. Enfin le X rappelle la forme de celui de l’épitaphe d’Adda à Poitiers[12], datée de la seconde moitié du IXe siècle qui comporte aussi un C carré. Tous ces éléments paléographiques plaideraient donc en faveur d’une datation dans la seconde moitié du IXe siècle.




[1] Morlet, Les noms de personne, t. I, p. 160 a.
[2] Leotarius, Letherius dans le cartulaire de Saint-Cyprien de Poitiers au IXe siècle par exemple ; Cartulaire de l'abbaye de Saint-Cyprien de Poitiers , ed. L. Redet , Poitiers, 1874, actes 402, 405 ou encore 410.
[3] Dans le polyptique d’Irminon et dans l’obituaire de Saint-Germain-des-Près par exemple ; Das Polyptychon von Saint-Germain-des-Près. Studienausgabe , ed. D. Hägermann , Vienne, 1993, p. 147, § XVII, 7.
[4] Morlet, Les noms de personne, t. I, p. 110 et 61a.
[5] Voir supra n° 24.
[6] Voir supra n° 19.
[7] Voir supra n° 53.
[8] CIFM, 15, n°15, p. 26-28, fig. 22.
[9] Voir supra n° 36.
[10] Voir supra n° 9.
[11] Voir infra n° 79.
[12] Voir infra n° 78.