​ Allouis, église Saint-Germain ​- ​Commentaire de scène et identification dans les peintures murales de la Crucifixion  ​  ​


Allouis, église Saint-Germain ​- ​Commentaire de scène et identification dans les peintures murales de la Crucifixion

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. 26, nº2 ​  ​


Description générale

Commentaire de scène.  Identification d'un personnage. 
Peintures murales.  État de conservation : médiocre. Découvertes à la fin des années 1960, les peintures de l’église ont été restaurées en 1974. Localisation : église, intérieur, mur diaphragme, face occidentale, côté gauche, registre inférieur, dans la scène de la Crucifixion. ​
Datation : vers 1160 ou seconde moitié du XIIe siècle [datation archéologique et stylistique des peintures murales, en accord avec les données paléographiques] et restauration au XXe siècle.

Description paléographique

Disposition horizontale sur deux lignes. Lettres blanches sur fond ocre jaune. Écriture capitale, régulière ; module étroit, ductus simple ; H de Melachim oncial. Les empattements sont marqués. A de Maria à plateau débordant du côté gauche. Abréviation de Jhesus par contraction signalée par un tilde, de sancta par réduction à l’initiale ; présence d’un point médian à la fin de la première inscription et après Maria. H enclavé dans le C de Melachim. La première ligne de la deuxième inscription mesure 13,5 cm et la seconde 8 cm ; le second A de Maria mesure 4 cm de hauteur et 3 cm de largeur.





Édition imitative


Sur l’écriteau, en haut de la Croix :
1 ​IH̅C ​A ​NAZVRIM ​
2 ​MELACHIM ​[.]VDA ​

Sous la bras gauche de la Croix, à droite de la tête de la Vierge :
1 ​S ​MA
2 ​RIA ​

Sur l’écriteau, en haut de la Croix :
1 ​IH̅C ​A ​NAZVRIM ​
2 ​MELACHIM ​[.]VDA ​

Sous la bras gauche de la Croix, à droite de la tête de la Vierge :
1 ​S ​MA
2 ​RIA ​

Sur l’écriteau, en haut de la Croix :
1 ​IH̅C ​A ​NAZVRIM ​
2 ​MELACHIM ​[.]VDA ​

Sous la bras gauche de la Croix, à droite de la tête de la Vierge :
1 ​S ​MA
2 ​RIA ​

Légende

Violet : caractères allographes.



Sur l’écriteau, en haut de la Croix :
1 ​IH̅C ​A ​NAZVRIM ​
2 ​MELACHIM ​[.]VDA ​

Sous la bras gauche de la Croix, à droite de la tête de la Vierge :
1 ​S ​MA
2 ​RIA ​

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



Sur l’écriteau, en haut de la Croix :
1 ​IH̅C ​A ​NAZVRIM ​
2 ​MELACHIM ​[.]VDA ​

Sous la bras gauche de la Croix, à droite de la tête de la Vierge :
1 ​S ​MA
2 ​RIA ​

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



Sur l’écriteau, en haut de la Croix :
1 ​IH̅CANAZVRIM
2 ​MELACHIM[.]VDA

Sous la bras gauche de la Croix, à droite de la tête de la Vierge :
1 ​SMA
2 ​RIA

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

Jh(esu)s a Nazurim. Melachim [J] uda. S(ancta) Maria.

Traduction

Jésus le Nazaréen, roi des Juifs. Sainte Marie.

Commentaire

La première inscription constitue un hapax dans la documentation épigraphique française publiée. Elle ne donne pas le titulus habituel de la Croix (Jesus Nazarenus rex Judaeorum, Jn XIX, 19), mais une reconstitution d’une version hébraïque mais par quelqu’un qui ne connaît pas l’hébreu. Le premier mot est en grec ; les termes nazurim et melachim sont au pluriel, alors qu’ils devraient être au singulier. Plusieurs hypothèses peuvent être proposées pour expliquer ce choix : l’auteur a travaillé à partir d'une liste lexicale mal faite ; ou, sa liste est bien faite, mais il ne la comprend pas ; ou bien encore, il a écrit à partir d'une liste lexicale qu'il comprend, mais il s'invente une sorte de pluriel de majesté pour cette formule. En tous les cas, cette inscription témoigne d’une culture pseudo-hébraïsante et des jeux sur les langues qu’elle pouvait entraîner en cette seconde moitié de XIIe siècle[1].

La Crucifixion fait partie des quatre scènes peintes sur la façade occidentale du mur diaphragme de l’église d’Allouis, comprenant au-dessus la Mise au tombeau, et à droite de l’arc les Saintes femmes au Sépulcre (registre supérieur) et la Vierge en Majesté (registre inférieur). L’ensemble des peintures est assez effacé et ne permet pas de savoir si d’autres textes épigraphiques accompagnaient les figures et les scènes. Il est néanmoins probable que le décor s'étendait à l'abside, au choeur et peut-être à une partie de la nef.




[1] Que Benoît Grévin soit chaleureusement remercié pour l’analyse de cette inscription.