Inscription funéraire pour un archevêque de Bourges. Lame de cuivre. Inscription disparue. Localisation d’après la bibliographie : intérieur de l’église, au milieu du chœur. Datation : 1232 [datation par identification du personnage] ou XIIIe siècle.
Bibliographie
Texte d’après la Gallia christiana. GC, 1656,
t. I, col. 177 (version 1720, t. II, col. 69), [texte] ; Thaumas de la Thaumassière, Histoire de Berry, 1689,
livre IV, chap. 81, p. 313-314 [texte] ; Carré de Busserolle, Dictionnaire géographique d’Indre-et-Loire et de Touraine, 1977,
t. I, p. 225 [texte] ; Boyer-Gardner, « Souvenir et sépultures des archevêques de Bourges », 2018 [texte].
Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription. Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.
Édition normalisée
Mole sub hac lapidis, sacrata sede sedentis Philippi Bituris ossa beata jacent. Clarus in orbe fuit, pauper sibi, pauperis altor, carnem mire domans, assiduis precibus. Vivus humoque jacens, medicamen praestitit aegris ; est sibi nunc crebris laurea pro meritis.
Traduction
Sous cette masse de pierre reposent les bienheureux ossements de Philippe de Bourges qui prit place sur le siège sacré. Brillant dans le monde, il fut pauvre pour lui-même, nourrissant le pauvre, domptant prodigieusement sa chair par des prières assidues. Tant vivant que gisant dans la terre, il est remède pour les malades ; il a désormais la couronne de laurier pour ses nombreux mérites.
Commentaire
L’inscription funéraire pour Philippe Berruyer est composée de trois distiques élégiaques ; une rime en -is réunit les deux premiers vers et les deux derniers.
Ce texte est très formulaire, mettant en avant les qualités personnelles de l’archevêque, comme son esprit de pauvreté, son affection pour les malheureux ou ses mortifications[1].
L’expression mole sub hac est employée durant tout le Moyen Âge ; elle relève des formules liminaires, en attaque de vers et de poème[2].
Clarus in orbe se trouve à de nombreuses reprises sous la plume d’Alcuin[3].
La seconde partie du vers 3 est une variante de la formule pauper sibi dives egenis, déjà présente dans les inscriptions chrétiennes de la Gaule, et attestée en 1083 à Caen et en 1151 ou après à Potigny[4].
Philippe Berruyer fut archevêque de Bourges de 1236 jusqu’à sa mort en 1260 ou 1261. Auparavant évêque d’Orléans, il fut transféré au siège archiépiscopal de Bourges directement par le pape Grégoire IX pour mettre fin à un temps de vacance de trois ans et demi, qui menaçait de durer.
L’expression métrique ossa beata rappelle le culte populaire dont le défunt fut l’objet dès sa mort, bien qu’il ne fut jamais porté au nombre des saints.
Elle est rarement employée dans la documentation épigraphique, seules deux autres occurrences ont été relevées : l’une dans l’épitaphe versifiée du duc d’Aquitaine, Guillaume le Pieux rédigée au XIIe siècle[5],
l’autre désignant réellement des reliques, dans l’inscription également versifiée qui se trouvait sur la châsse de saint Siffrein à la cathédrale de Carpentras en 1285[6].
Présentation du site
La cathédrale Saint-Étienne de Bourges constitue l'une des réalisations architecturales majeures du XIIIe siècle. Commencée à la fin du XIIe siècle par Henri de Sully, elle fut consacrée le 5 mai 1324 par l'archevêque Guillaume de Brosse. Les portails latéraux sont le témoignage de l'édifice immédiatement antérieur. Ses dimensions, ses formes, l'importance de sa vitrerie encore en place ont permis à l'édifice de bénéficier de nombreuses études auxquelles nous renvoyons le lecteur pour des informations plus détaillées[7]. Une soixantaine de textes épigraphiques connus ont été gravés ou peints à la cathédrale durant l’époque médiévale : inscriptions funéraires pour les archevêques de Bourges et un chanoine, textes en relation avec les personnages sculptés et surtout messages peints sur les vitraux.
[1] Voir la notice que lui consacre A. Gandilhon, dans le Dictionnaire d’histoire et de géographie ecclésiastiques,
t. VIII, 1935, c. 892-897. [2] Pour ne citer qu’un exemple, voir l’inscription funéraire de saint Mamert, à Saint-Pierre de Vienne, et le commentaire (CIFM,
15, n°129, p. 131-132, pl. XLIX, fig. 103). [3]Schumann O., Lateinisches Hexameter Lexikon. Dichterisches Formelgut von Ennius bis zum Archipoeta , Munich,
vol. 1, 1979, p. 358. [4] Inscription funéraire pour la reine Mathilde (CIFM,
22, n°16, p. 51-54) ; inscription funéraire pour Hugues de Mâcon (CIFM,
21, n°107, p. 116-117). [5]CIFM,
18, n°8 Haute-Loire, p. 94-95. [6]CIFM,
13, n°32 Vaucluse, p. 142. [7] En attendant la publication des actes du colloque consacré la cathédrale de Bourges, on verra la monographie de Christe Y., Brugger L., Bourges : la cathédrale, Saint-léger-Vauban, 2000.