​ Melle, église Saint-Pierre ​- ​Inscription funéraire pour Cristina  ​  ​


Melle, église Saint-Pierre ​- ​Inscription funéraire pour Cristina

Corpus des Inscriptions de la France Médiévale, vol. Hors-série I, nº61 ​  ​


Description générale

Inscription funéraire à caractère obituaire. 
Dalle funéraire. ​ Pierre.  Cette inscription, découverte près de l’église Saint-Pierre, lors de travaux d’aménagement de la place, en septembre 2000, est actuellement exposée dans la nef. Dimensions = 108 x 42/28 cm ; épaisseur = 19 cm. Sur la surface grossièrement lissée le graveur a préparé cinq lignes – quatre interlignes de deux traits dans le sens de la longueur. Seules les deux premières lignes ont été utilisées aux deux tiers. Inscription complète ; état de conservation : bon.
Datation : VIIIe-IXe siècle ? [datation paléographique].

Bibliographie

Texte établi d’après l’original vu en place en 2009.
Vareille, « Les épitaphes médiévales de Melle », 2004, p. 96 [texte, traduction, dessin, étude] ; Treffort, Mémoires carolingiennes, 2007, p. 196 [cliché] et p. 328 [mention, bibliographie] ; Une société de pierre, 2009, p. 31 [texte et cliché].

Description paléographique

Écriture assez disparate, proche de ce que l'on peut lire sur la dalle d'Eberfredus, sans toutefois la présence dominante des capitales romaines. Le module est irrégulier et les graphies sont d'ailleurs parfois éloignées des capitales : E oncial de ego, S et C carrés, O en losange, A à traverse brisée, M aux jambages écartés, V en forme de U. Le G de ego est très original et adopte la forme du S carré diminué de sa traverse inférieure. Hauteur moyenne des lettres = 3,5 cm. Plusieurs abréviations par contraction : fratres, carissimi, seculo. Pas de ponctuation.





Édition imitative


1 ​EGO ​FR̅S ​KMI ​CRISTINA ​PVELLA ​
2 ​OBIIT ​IN ​PACE ​DE ​OC ​SCLO ​Q ​

1 ​GO ​FR̅S ​KMI ​CRISTINA ​PUELLA ​
2 ​OBIIT ​IN ​PACE ​DE ​O ​SꝈO ​Q ​

1 ​GO ​FR̅S ​KMI ​CRISTINA ​PUELLA ​
2 ​OBIIT ​IN ​PACE ​DE ​O ​SO ​Q ​

Légende

Violet : caractères allographes.



1 ​GO ​FR̅S ​KMI ​CRISTINA ​PUELLA ​
2 ​OBIIT ​IN ​PACE ​DE ​O ​SꝈO ​Q ​

Légende

Bleu : mot abrégé.
Violet : signe d'abréviation.



1 ​GO ​FR̅S ​KMI ​CRISTINA ​PUELLA ​
2 ​OBIIT ​IN ​PACE ​DE ​O ​SꝈO ​Q ​

Légende

Bleu : enclavement.
Orange : conjonction.
Violet : entrelacement.



1 ​GOFR̅SKMICRISTINAPUELLA
2 ​OBIITINPACEDEOSꝈO ​Q

Légende

Représentation des espaces entre les lettres tels qu'ils sont dans l'inscription.
Violet : signalement des figures qui s'interposent avec le texte.



Édition normalisée

Ego fr(atre)s k(arissi)mi Cristina puella. Obiit in pace de hoc s(e)c(u)lo ...

Traduction

Moi, très chers frères, Christine, fillette, Elle a trépassé en paix, de ce monde…

Commentaire

Malgré sa brièveté, cette inscription appelle un certain nombre de commentaire. La disproportion entre l'espace préparé à la surface de la pierre et la quantité de texte effectivement gravé montre que le projet épigraphique pour la défunte du nom de Cristina a été interrompu. On ignore malheureusement les raisons de cette interruption. Le début du texte, ego fratres carissimi, est identique, dans le contenu comme dans la graphie, à ce que l'on trouve dans l'inscripton de Godemerus mais il n'a pas de sens dans le texte pour Cristina, qualifiée de puella. La seconde ligne est tout aussi mystérieuse puisqu'il est difficile de mettre en relation la formule obituaire obiit in pace, courante à l'époque carolingienne[1], et le complément de hoc seculo, beaucoup plus fréquent après le verbe migrare qu'après obire. Doit-on supposer pour ce texte une construction à partir d'un formulaire mal compris ou bien une création originale avortée et de fait incompréhensible ?

Le nom romain Cristina est attesté dans sa graphie melloise à de nombreuses reprises dans la documentation diplomatique dès le IXe siècle[2]. L'analyse paléographique permettrait d'attribuer cette datation à l'inscription même si la langue du texte renvoie à l'époque mérovingienne. Son caractère original, décousu et tronqué laisse supposer qu'elle est inspirée de celle de Godemerus, qui elle a un sens ; elle pourrait donc être postérieure, même de peu et appartenir ainsi à la fin du VIIIe ou au début du IXe siècle.




[1] On verra par exemple dans ce volume l'épitaphe d'Erdramnus à Angers ; notice n° 27.
[2] Morlet, Les noms de personne, t. II, 33.